Segah Şarkı

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Présentation de l'oeuvre

Niveau de présentation : Avancé

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Segah Şarkı


Musique savante de Turquie
Segah Şarkı
Makam, musique classique ottomane

Pour écouter et comprendre le makam ottoman, Serdar Pazarcıoğlu interprète ici la chanson (şarkı) "Dönülmez akşam ufkundayız vakit çok geç" ("A l'orée du soir sans retour il est déjà tard") dans le makam Segah. Cette pièce fut composée par Münir Nurettin Selçuk, chanteur et compositeur actif dès les années 1920 sur la scène musicale stambouliote, sur un poème de Yahya Kemal Beyatlı.
Enregistrement en octobre 2020,
© Serdar Pazarcıoğlu.

Présentation de l'oeuvre

Introduction au makam ottoman

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Dans la tradition ottomane le terme makam désigne le système modal en vigueur dans la musique classique ainsi que les différents éléments qui le composent. Sans s’y attarder ici, il faut savoir que le terme makam (ou maqâm) a d’autres acceptions dans les traditions voisines.

Le makam qui s’est développé à Istanbul est le fruit de la rencontre des traditions turque, arabe, persane et byzantine. Il dispose de tout un vocabulaire en persan qui décrit une réalité propre à cette culture ottomane et qu’il faudra distinguer de ses homonymes persans ou azéris, bien que l’origine soit historiquement commune.

Il faut toutefois préciser qu’au sein même de la tradition ottomane, un même nom, par exemple rast, peut désigner trois choses différentes (nous conserverons cette triple graphie tout au long de l’analyse) :

-  le degré RAST :

  • le pentacorde de rast (NB yerinde signifie qu'il est ici dans sa forme "originelle", non transformé) :

  •     le makam Rast :

On peut ainsi dire que RAST est le premier degré du premier tétracorde de rast qui compose le makam Rast.

 

Les degrés dans le makam ottoman

Voici un tableau qui récapitule les noms des degrés au sein des deux octaves dans lesquelles se déploie le makam turc :

Les degrés (perde, pl. perdeler) dans le makam ottoman

Les degrés (perde, pl. perdeler) dans le makam ottoman

 

Transposition et notation des degrés et intervalles

Dans le cadre de cette étude, nous préférons employer le vocabulaire traditionnel car il permet de se repérer aisément dans l’espace musical tout en évitant les problèmes liés à la transposition. En effet, en fonction de la tessiture des chanteurs, tout le système est transposable, ainsi RAST reste RAST même un ton en-dessous.

Il semble nécessaire ici de faire un point sur la notation. La musique ottomane est écrite depuis un siècle avec la notation occidentale grâce à un ensemble de symboles supplémentaires. On nomme le plus couramment les notes DO RE MI etc. sauf quand il pourrait y avoir un doute sur la nature de la note, on passe alors immédiatement à leurs noms vernaculaires.

 

Les intervalles dans le makam ottoman :

 

Il convient aussi de noter que les hauteurs ne coïncident pas forcément avec le référentiel occidental. Ainsi, la transposition principale de la musique instrumentale bolahenk est transposée une quarte plus basse, ainsi RAST noté SOL est entendu RE (293,7 Hz).


De la même manière que précédemment, si on transpose en süpürde (un ton en dessous), RAST sera toujours nommé SOL mais entendu DO (261,6 Hz).

Le fonctionnement du makam

Le makam ("lieu" ou "espace" en arabe) comme système est un ensemble non fini de plusieurs makam (au sens de mode). Il devient audible par la circulation à l’intérieur et entre ces différents espaces.

Ces modes sont caractérisés par leur échelle (dizi) mais surtout par leur seyir, un développement mélodique qui leur est propre. Ainsi deux makam à l’échelle identique constituent deux makam distincts si l’un commence son cheminement sur la fondamentale et l’autre sur la quarte.

Prenons pour exemple Uşşak et Beyati :

 

 

Le fonctionnement du makam. Illustration pratique sur l'échelle de Echelle de Uşşak et Beyati par Ruben Tenenbaum (enregistré en octobre 2020, © R. Tenenbaum)

Uşşak commence son développement autour de la fondamentale pour ensuite monter vers la quarte puis redescendre. Il est dit ascendant.

Alors que Beyati commence directement autour de la quarte pour descendre vers la tonique. Il est dit ascendant-descendant.

Ces zones de développement s’articulent autour de notes polarisées qui sont également le point de jonction des tricordes, tétracordes ou pentacordes que contient le makam. En effet, si l’on décompose l’échelle de Uşşak et Beyati, on trouve un tétracorde de uşşak et un pentacorde de buselik qui s’articulent autour de la quarte.

Ainsi l’échelle d’un makam peut être comprise comme la somme d’un tétracorde et d’un pentacorde qui sont eux d’un nombre limité.

La description théorique par tétracorde est la plus répandue. Elle est assez fonctionnelle et l’ensemble des makam ont été décrits de la sorte. Cependant cette structure ne doit pas faire oublier qu’à l’intérieur de ce canevas on retrouve des motifs qui permettent d’identifier les makam et des logiques mélodiques plus précises qui, elles, sont plus rarement verbalisées.

15 octobre 2020

Ruben Tenenbaum

Musicien